LETTRE d'information Janvier 2025
Le rapport national d’enquête sur la permanence des soins de la DGOS : Et maintenant ?…
- Un déséquilibre structurel et une surcharge du secteur public
- Le recueil non exhaustif des données à confronter aux réalités du terrain
- Une sous-valorisation systématique des ressources humaines mobilisées
- Une absence de propositions de solutions structurelles et stratégiques
- Aucune reconnaissance de la 5ème plage de travail pour les activités de fin de journée pour la continuité des soins au niveau du service
- Nos recommandations syndicales plus que jamais d’actualité
Ce document soulève des inquiétudes majeures quant à l’avenir de l’organisation des soins, l’équilibre des charges entre les secteurs public et privé, et la reconnaissance effective des efforts effectués par les soignants.
L’analyse de ce document nécessite d’emblée des remarques attentives sur les biais méthodologiques observés avant d’en tirer des conclusions pertinentes.
- Un déséquilibre structurel et une surcharge du secteur public
Le rapport met en évidence que 69 % des lignes de PDSES sont assurées par le secteur public, contre seulement 23 % pour le secteur privé lucratif et 8 % pour le privé non lucratif. De plus, 83 % de l’activité de permanence des soins (« nouveaux patients ») est gérée par le secteur public. Ce constat illustre un transfert inégal de la charge de travail, au mépris des limites organisationnelles et humaines de ces établissements.
Cette situation injuste n’est pas soutenable. Loin d’être un service public « valorisé », le secteur public est épuisé par des contraintes budgétaires et des départs massifs de professionnels. Pendant ce temps, les secteurs privés restent sous-utilisés, renforçant les disparités territoriales et organisationnelles, notamment en termes de continuité et de permanence des soins.
- Le recueil non exhaustif des données à confronter aux réalités du terrain
Le rapport souligne que les données recueillies reposent sur des déclarations des établissements, avec des « contrôles de cohérence limités« . Cela introduit des biais significatifs et une sous-estimation possible des tensions toutes les filières de soins critiques. Comment concevoir des politiques efficaces si les chiffres de base ne sont pas fiables ?
Concernant la radiologie, les résultats ont été artificiellement divisés au sein des « spécialités médico-techniques » (avec la biologie, la pharmacie et l’anatomopathologie) pour le diagnostic et des « activités interventionnelles » (avec l’endoscopie digestive, la cardiologie interventionnelle, l’interventionnel pulmonaire) pour la Radiologie interventionnelle et la Neuroradiologie interventionnelle. Ce choix méthodologique plutôt confus est très discutable car il rend quasi-impossible une évaluation claire et spécifique de cette spécialité essentielle dans la prise en charge des patients en situation de permanence des soins en urgence.
- Une sous-valorisation systématique des ressources humaines mobilisées
Le rapport indique que le nombre médian de praticiens mobilisés par ligne serait de 5 pour l’ensemble des spécialités. Toutefois, ces données ne reflètent pas la réalité du terrain :
- Les internes et autres praticiens juniors représentent une part importante de l’effectif (14 % des lignes recensées impliquent des internes).
- Les praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE) participent également massivement à ces lignes, souvent dans des conditions de travail précaires.
La stratégie de court-termisme effectivement mise en place depuis plusieurs années repose sur une « main-d’œuvre » moins coûteuse, insuffisamment reconnue, parfois encore de formation ou de consolidation des compétences, imposant une validation ou un contrôle par des médecins séniors, et interrogeant parfois la qualité et la sécurité des soins.
- Une absence de propositions de solutions structurelles et stratégiques
De manière décevante, ce rapport ne propose pas de réponses concrètes pour pallier les dysfonctionnements clairement identifiés par tous :
- Aucune mention d’une augmentation nécessaire des moyens financiers pour rééquilibrer les charges entre secteurs.
- Aucune feuille de route stratégique claire pour encourager le développement des lignes partagées, qui ne représentent que 5 % des lignes recensées pour les gardes et astreintes.
- Aucun engagement en faveur de la qualité de vie des professionnels, alors que la maîtrise du temps de travail, composante majeure de la pénibilité des gardes et astreintes, est citée comme une attente majeure des soignants.
- Aucune reconnaissance de la 5ème plage de travail pour les activités de fin de journée pour la continuité des soins au niveau du service
En juin 2023 le Conseil d’État, sans toutefois imposer un décompte horaire journalier, annonçait la nécessité pour les établissements de santé, de réaliser un décompte horaire notamment lors des gardes et astreintes afin de rester sous la barre des 48h hebdomadaires moyennées sur 4 mois.
Si 10 demi-journées par semaine représentent, comme le suggèrent le Conseil d’État et la Directive européenne, le nombre total d’un temps de travail de 48 heures au maximum, alors 24 heures correspondent sans équivoque à 5 plages horaires de 4h50, regroupant les 2 « plages habituelles en journée », plus 2 plages horaires pour la permanence des soins de nuit, et une 5ème plage horaire pour la continuité des soins entre le jour et la garde.
Ainsi loin des rigidités des décomptes administratifs, Alliance-Hôpital (SNAM-HP & CMH) exige au regard de ces 48 heures maximum la reconnaissance d’un temps de travail juste et choisi par le financement de cette 5ème plage au niveau du service autorisant des prises en charges d’excellence et une sécurité des soins aux patients, dans le respect d’une qualité de vie au travail des professionnels.
- Nos recommandations syndicales plus que jamais d’actualité
Face à ces constats, nous exigeons :
- Une reconnaissance de l’inégalité de répartition des permanences de soins entre privé et public avec un travail sur la valorisation des permanences de soins, ainsi que sur la qualité de vie au travail pendant ces temps particuliers, dont la pénibilité est très inégale en fonction de l’activité.
- La reconnaissance d’un temps de travail juste et choisi par le financement de la 5ème plage au niveau du service autorisant des prises en charges d’excellence dans le respect de la sécurité des soins aux patients et d’une qualité de vie au travail des professionnels.
- Un financement à la hauteur des besoins réels, incluant des budgets alloués au recrutement, à la formation et à la rémunération des personnels, avec une véritable revalorisation des lignes d’astreintes et de gardes pour les praticiens les personnels et leurs structures.
- Une valorisation des lignes partagées et du travail collaboratif sur le territoire, créant des dynamiques de modèles coopératifs inter-établissements et entre secteurs notamment au sein et autour des GHT.
- Une reconnaissance effective de la quantité et de la qualité des soignants mobilisés.
- Un travail au sein des SROS sur les lignes d’astreintes et de gardes, en prenant en compte l’activité en nuit profonde et en adaptant le nombre de médecins impliqués tous statuts confondus, ainsi qu’une véritable revalorisation des gardes et astreintes pour les praticiens comme pour les structures.
Ce dossier de la continuité et de la sécurité des soins est emblématique des multiples contraintes que nous devons maitriser pour garantir une pleine sécurité des soins aux patients et une qualité de vie des professionnels, à l’heure ou la permanence des soins devient critique faute de mesures à la hauteur des enjeux.
Alliance-Hôpital (SNAM-HP & CMH) fera preuve de toute la vigilance et de la combativité nécessaire pour que les décisions stratégiques essentielles pour l’hôpital public soient menées, pour le meilleur intérêt des patients de l’hôpital public et des professionnels de santé, quelle que soit leur spécialité médicale et leur statut.
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